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la voix du masque
2 septembre 2009

Gillian Wearing; confessions: portraits vidéos

DU 10 AVRIL AU 1ER NOVEMBRE 2009
au musée Rodin, Paris, accessible par les collections permanentes
 

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Voulant proposer un écho contemporain aux portraits de Rodin dans la salle d'exposition (voir post précédent: la fabrique du portrait), Le musée Rodin propose des vidéos de l'artiste britanique Gillian Wearing.

pwear1Une petite salle, au centre largement occupé par une structure de cloisons offrant l'accès à deux espaces de petite taille où se trouvent des écrans qui diffusent les vidéos. Il semble que la volonté de l'artiste ait été d'isoler le spectateur qui regarde chacune des vidéos. Dans les faits, il n'en est rien, les gens déambulent autour de la construction et restent distants, dans l'allée.

 

Les vidéos sont des plans fixes sur le buste de personnes dissimulées par des masques de déguisement industriels, des perruques, des barbes postiches etc., le tout cumulé. Ces personnes sont amenées à confier un souvenir douloureux de leur vie "trauma", ou un secret intime "secrets and lies". Le masque leur garantit l'anonymat (on pense à des émissions télévisées de témoignages où perruques et lunettes noires sont employées pour la même raison) et donc pourrait libérer la parole.

L'effet est dérangeant, certes, mais tout autant lorsque les accoutrements sont outrés et grotesques que lorsqu'ils sont plus sobres (masque neutre dit la plaquette: de fait on en est loin: voir illustrations ci-dessus). L'œil reste le seul espace vivant de ces faces de carnaval, et l'on ne peut que s'y accrocher. On l'interprète comme larmoyant, surement à tort, c'est qu'il est chair dans un cadre de plastique.

Les bouches sont fixes (des masques complets) et donc on n'arrive pas à faire le lien entre la narration entendue et le fantoche de l'image. L'une des vidéos n'est pas traduite ce qui rend l'expérience encore plus désincarnée si l'on n'est pas bilingue.

 

C'est là la limite de la démarche de l'auteur de ces vidéos, en déguisant de la sorte les sujets, elle les rend anonymes (contrairement au sous-titre de l'exposition qui parle de portraits), et en les rendant anonymes, elle enlève tout possible effet d'empathie, donc d'intéret (je n'ai vu personne s'arreter plus d'une minute face aux écrans). Mouvements et son n'y feront rien. les sujets nous restent muets. Nous sommes bien évidemment à l'opposé de l'oeuvre de Rodin, qui avec la seule forme d'un visage sculptée fait "parler" l'individualité du modèle, le révèle au spectateur.

 

Je me questionne sur cette récurrence de l'utilisation des masques de plastique bon marché dans les œuvres contemporaines, qu'elles soient d'arts visuels ou de théâtre. (j'ai peu d'exemples précis en tête, et pourtant j'ai l'impression d'en avoir vu tant: si vous avez des souvenirs dans ce sens, des noms à avancer, commentez!).

L'objet représente un archétype bien connu et/ou un personnage célèbre (Mickey, une sorcière, un homme politique célèbre, Marilyn, un clown...) auquel le carnavalier ou l'enfant tendrait à s'identifier un temps. Une personnalité cachée, un double fantasmé.

Mais par la multiplication mécanique de milliers de pièces à l'identique, le sens même de l'individualité disparait pour devenir tout le monde, soit personne. On voit imédiatement à qui/quoi il est fait référence, mais on oublie imédiatement au profit du "c'est un masque". Au fond, ce type de masque devient le symbole de l'anonymat dans le monde de la célébrité obligatoire. (doit-on rappeler la phrase de Andy Warhol « Dans le futur, chacun aura droit à 15 minutes de célébrité mondiale. »?) . Et c'est ainsi que l'objet de fête en vient à incarner l'inquiétant ou la dépersonnalisation. Réflexion à suivre, je pense...

 

Plus de détails sur l'exposition, prolongée jusqu'au 1er novembre, sur le site du musée: ici


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Commentaires
G
Bonsoir!<br /> <br /> C'est un très bon article, félicitation.<br /> <br /> Fais une petite recherche sur narcisse sister. Je l'ai vu dans un documentaire qui s’appelle "tatane à New York". Ça peut être intéressant pour toi.<br /> <br /> Bonne continuation.
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