La fabrique du portrait: Rodin face à ses modèles
la fabrique du portrait:
Exposition au Musée Rodin de Paris
du 10 avril au 23 août 2009
L'exposition, qui se tenait dans la partie moderne du musée Rodin de Paris, avait pour thématique le portrait.
Elle mettait l'accent sur les personnalités du temps du sculpteur, leur biographie, le lien qu'il a pu entretenir avec elles. Rien qui soit comparable à un masque au sens strict du terme là dedans, mais de beaux portraits, et quelques vitrines mettant en avant la recherche de la forme juste des visages par de multiples études.
Dans la première salle j'ai été frappée par la série de Balzac.
On connait du sculpteur la grande statue-portrait en pied présente dans le jardin du musée Rodin, sur le quai du métro le plus proche, au musée d'Orsay et dans le 6è arrondissement de Paris (et je ne parle que de Paris!). Avant d'en arriver là, il a fait nombre de portraits de l'auteur dont certains se trouvent dans le musée, en exposition permanente. Des œuvres à part entière, souvent en pied, tirées en bronze. (voir photos ci dessous)
Dans l'exposition, quatre terres cuites, des études, probablement classées par ordre chronologique, et ça se voit: les formes s'accentuent, le dessin se précise, les traits apparaissent de plus en plus clairement, nerveusement, dans la masse de chair arrondie du modèle.
Le dernier de la série "avant dernière étude; v.1896" (croquis) me parait particulièrement vivant, et pourtant c'est comme si le visage de l'écrivain était accroché sur la peau de ses bajoues, les sourcils sont particulièrement proéminents, les yeux enfoncés, le nez en avant, la moustache semble flotter au dessus de la lèvre. le portrait est expressif, les volumes jouent avec les lumières et ombres et soulignent vivement le caractère, sans le caricaturer. une belle leçon.
Dans la salle suivante, une série de bustes, bronzes sur pied, pourrait n'avoir que l'image du convenu. Pourtant l'accumulation (une dizaine côte à côte) souligne la grande diversité des traitements, et laisse présager de personnalités fort divergentes. La palette des expressions vives ou mélancoliques, posées ou animées en est bien entendu la cause, mais le traitement plastique des visage, des cheveux et poils, accentue vigueur ou atonie. Il aurait été drôle de savoir comment les portraiturés ont perçu leur image.
(ci contre, Maurice Haquette, Bronze - Photo : C. Baraja / Musée Rodin)
Un peu plus loin une petite vitrine avec deux portrait de la comédienne, chanteuse, danseuse japonaise Hanako. Là encore, des bustes de la dames existent dans les salles du musée (photos), mais dans l'exposition nous trouvons des "masque type B" et "masque type C" (si quelqu'un sait à quoi cela fait référence...merci de laisser un commentaire! Je dirais à priori B sur médaillon, C sur pied)
Ce sont des études, et l'expression est plus marquée que sur les œuvres plus abouties. Notamment la terre cuite sur médaillon (croquis), le front froissé, la bouche entrouverte sur les dents. Bien que l'époque ne s'y prête pas on voit une danseuse de Butô (danse "des ténèbres" japonaise apparue après Hiroshima), avec tout l'expressionnisme que cela suppose.
Il y a bien des œuvres je n'ai pas évoqué, ma visite ayant été orientée par ma recherche autour des masques. Pourtant, en quittant l'exposition, on ne peut pas ne pas se sentir tout petit à côté d'un immense bronze de Victor Hugo, nu, penchant la tête vers nous pauvres humains parés. Il semble en effet que le sculpteur (de talent) dénude, dévoile l'homme qu'il fixe dans la matière, il ne lui crée pas de masque.
En parallèle, se tient une exposition contemporaine dans le bâtiment du musée, c'est l'objet du prochain post.